Quel est ton rêve le plus cher ?
La question n’est pas aisée puisque tu fais souvent passer le bien des autres et les rêves des autres avant les tiens. Mais si tu devais réellement penser à un but, ce serait d’être heureux. Tout simplement. Une famille, une ferme, un titan domestique. Bon, peut-être pas quand même, mais l’idée est là. Après, si tu dois être réaliste, tu voudrais simplement voyager, aller voir ce que les humains ne connaissent pas. Parce que tu le sais, tu le sens au fond de tes trippes : le monde est immense.
Crains-tu les Titans ?
Ce n’est pas réellement de la crainte. Tu as une admiration sans faille pour les titans. Parce que tu ne les comprends pas. Ils n’ont pas réellement de capacités folle mais leur fonctionnement te laisse perplexe. Et puis, tu veux les vaincre aussi, prendre le dessus. Tu vois ça comme un jeu dans lequel vous êtes perdants depuis trop longtemps. Tu es joueur et tu es mauvais perdant. Alors tu les attends au tournant. Et ce jour-là, tu seras prêt.
Comment vois-tu ta vie dans quinze ans ?
Il y a tellement de variable que cette question en elle-même n’a aucun intérêt. Seras-tu en vie ? Les titans auront-ils été éradiqués ? Rien que ces deux questions changeraient la réponse que tu donnerais. Alors tu te contenteras de sourire et de partir, sans un mot de plus.
Que penses-tu du bataillon d'exploration ?
Tu les as rejoints dans l’unique but d’en savoir plus sur les titans, tu ne sais pas comment font ceux qui le rejoignent par choix ou quoi, mais c’est une bonne ambiance de camaraderie, en dehors des nombreuses morts. Et tu les pleurs, ces morts, comme chacun des soldats qui composent les bataillons. Tu essaies toujours de préserver tes hommes, de ne blesser ou tuer personne lors de tes expéditions de recherche. Tu n’y parviens pas toujours et chaque homme perdu sous tes ordres te marque un peu plus.
Et de la Garnison et des Brigades Spéciales ?
Tu te demandes si ces hommes ne se sont pas trompés de métier. Rejoindre l’armée pour boire toute la journée ou fouiller la merde, autant devenir barman ou garçon d’écurie. Ça aurait eu le même effet.
Tu as des choses à nous raconter à ton sujet ?
Ellison-Tridéris, deux noms plutôt connus au sein du mur Sina. Les premiers sont spécialisés dans le textile, ils produisent en grande quantité des tissus de qualités qui habillent les habitants de Sina principalement ainsi que la production des costumes de l’armée. Les Tridéris quant à eux étaient simplement des producteurs de viande, chère à la vie des gens aisés. La fusion des deux familles se fit par mariage arrangés. Rencontre après rencontre, les deux époux furent amenés à s’apprécier. Pas assez pour s’aimer mais suffisamment pour vivre à deux. Le mariage fut prononcé et l’année qui suivit vit venir la naissance de Louanne.

Une des particularités de la famille Tridéris, c’est de donner à leurs filles une couleur de cheveux particulière, d’un vert très pâle, presque blanc parfois. Un beau vert, qui peu se foncer un peu avec les années. Sheena Tridéris en avait hérité et l’avait transmise à sa petite fille, mais lorsqu’elle accoucha l’année suivante de Laurence, elle fut surprise de le voir également hériter de cette couleur. Elle n’en n’était pas mécontente mais, au fond, elle ne comprenait pas réellement ce qui avait bien pu se passer.

Louanne et Laurence étaient très liés, malgré l’immense demeure dont disposait leurs parents, ils passaient tout leur temps à deux dans la petite chambre de la jeune fille. Si Louanne était une enfant sage et très posée, Laurence était plus dissipée, plus curieux. Avide de connaissance, il touchait à tout et portait tout à la bouche dès qu’il le pouvait. En grandissant, le lien entre frère et sœur s’était renforcé. Le tempérament de Laurence aussi, il était le maillon fort entre eux deux, et elle le suivait plus que l’inverse.

Et puis, ils commencèrent l’école. Ils furent souvent brimés à cause de la couleur de leurs cheveux, et le prénom de Laurence n’aidait pas vraiment. Alors, le garçon défendait sa sœur bec et ongle, se battant à la moindre provocation. Il revenait souvent plein de coups et de blessures.
Et oui, déjà à l’époque, tu étais un bagarreur. Tu n’as jamais cessé depuis, et ton caractère ne s’est pas vraiment arrangé depuis le temps.

La séparation avec ta sœur se produisit lorsqu’elle passa dans « la grande école ». Tu étais un an plus jeune, tu la rejoindrais l’année suivante. Là, elle rencontra Huey et Dewey, deux garçons qui avaient toujours trainés ensemble. Ils intégrèrent Louanne à leur petite bande et se promirent de la protéger.
Sauf que ça ne te convenait pas. Tu n’avais pas confiance en eux. Tu te méfiais. Et puis, tu ne supportais pas l’idée que ta sœur n’ait plus besoin de toi. Alors, tu tentais d’attirer son attention, de te montrer indispensable. Jusqu’au jour ou l’idée de les séparer définitivement te vint à l’esprit.

Tu savais que Dewey avait des sentiments pour Lou, tu avais conscience de ça parce que ça t’avait toujours semblé évident. Et c’est ce qui te poussait à vouloir protéger cette sœur qui était tout ce que tu avais – hormis votre gouvernante qui était une véritable mère pour toi.
Alors, tu inventas un bobard, un message à Dewey qui lui faisait comprendre que Louanne se fichait de lui, et qu’elle avait tenu d’affreux propos à son sujet. Sanguin comme il était, il n’a pas tenu longtemps avant d’exploser. Les tensions furent telles que le petit groupe explosa, laissant Huey au milieu sans qu’il ne puisse rien y faire.

Jusqu’au jour où il vint te voir, pour que tu tente de raisonner Louanne, de lui faire entendre raison. C’est quand tu refusas assez sèchement qu’il fit le lien. Il ne lui fallu pas pousser très loin pour tirer au clair ta supercherie et mettre Lou devant les faits. Ce jour-là, tu crus perdre ta sœur pour toujours. Vous vous êtes hurlés dessus, tu t’es battu avec Huey comme un chat sauvage, et Lou te gifla, ce qui te retira toute ton énergie vitale. Ce soir-là, et six mois durant, tu ne quittas plus ta chambre. Seule Marguerite, votre gouvernante, entrait et tentait de te consoler.

Pendant six mois, tu te concentras alors sur tes études, sur ce que tu aimais. C’est à cette période là que tu dérobas une arme de poing à ton père sans qu’il ne le sache. Tu n’avais pas prévu de t’en servir, juste de l’observer. Mais il arriva, surpris de te trouver dans son bureau. Tu paniquas quelque peu devant cet homme qui te semblait jusqu’alors inaccessible. De ce jour naquit une complicité entre vous. C’est lui qui te donna envie d’en savoir plus sur les titans, sans qu’il ne s’en rende compte. Lorsqu’il te disait ne pas pouvoir répondre sur une question puisque personne ne le savait, tu notais dans un carnet d’enfant les différents points sur lesquels travailler.

Durant les années suivantes, tu tentas de retrouver avec ta sœur, un contact même sommaire. Malheureusement, sans résultat. Vous aviez à peine onze ans lorsque tu avais tenté de la séparer de ses amies mais, même près de dix années après, elle n’avait jamais oublié. Tu ne comprenais pas, tu t’étais excusé, tu avais essayé de te rattraper, de lui montrer que tu lui portais de l’intérêt, mais elle restait hermétique. Et ça te brisait le cœur.

Tu avais quinze ans lorsque tu décidas de rejoindre l’armée. Ton père tenta de t’en dissuader, évidemment. Ta mère aussi. Mais, Lou ne cilla même pas. Et au fond, c’est ce qui te fit le plus mal. Que tes parents s’inquiètent, tu n’en doutais pas : tu étais leur unique héritier mâle. Mais qu’elle ne fasse pas grand cas de ta possible mort prématurée fini de te fermer les portes de cette famille. Si elle ne voulait plus que tu en fasses partie, parfait.

Tu t’enrôlas dans l’armée et subit les trois années de formation avec brio. Tu finis dans les dix premiers sans mal mais personne ne fut surpris lorsque tu choisis de rejoindre le bataillon. Certains t’avaient pris pour un fou lorsque tu avais évoqué ton envie de décortiquer les titans, de les étudier. D’autres avaient mal pris ton admiration, et tu pouvais les comprendre au fond. Mais ça ne t’enlevait rien. Tu rejoins les rangs du bataillon et, tu grimpas peu à peu les échelons, rejoignant assez rapidement l’escouade de recherche et développement. Tu connaissais les armes, ton père t’avais fait étudier leur mécanique. Et tu avais des notions plus que poussées en sciences et en mathématiques, tu étais parfait dans ce rôle. Jusqu’à ce que tu deviennes seconds, puis chef. Tu occupes ce poste depuis trois ans et tu ne voudrais en changer pour rien au monde.