crépuscule

Le ciel se colorait aux couleurs du crépuscule, sans un nuage, sans perturbations aucune. Béryl avait choisi ce moment où tout le monde se préparait à aller dîner pour sortir un peu. Elle n’avait pas faim.

Elle avait pris quelques livres. Aimant lire et étudier -chose que tout le monde ne savait pas forcément- elle appréciait profiter de ces moments pour apprendre ce qui pourrait lui servir plus tard. Livres sur les chevaux, les titans, l’économie, la royauté….  Tout l’intéressait.

Elle considérait que la théorie était autant, voire plus important que la pratique. Savoir des choses, même sans jamais les expérimenter, était une sorte de moyen d’avoir le pouvoir de sauver sa peau. Le pouvoir, l’occasion, le petit truc en plus, le petit truc qui pouvait faire la différence.

mémoire

Ce soir-là, c’était un livre sur les stratégies militaires, ce qu’elle trouvait étrangement passionnant. Elle aimait voir les stratégies qui avaient été adoptées, celles qui avait fonctionné, mais aussi se rappeler ce qui avait été un échec, et de se rappeler des noms. C’était une sorte de devoir de mémoire, un moyen banal d’honorer les soldats tombés.

Pourtant ce n’était pas avec une gêne ou une tristesse quelconque qu’elle lisait ce soir. Elle n’aurait pas pu le définir elle-même.

Elle était assise là, sur le bord de cette fontaine dont le bruit berçait sa lecture.

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

Sursaut

Elle ne l’avait pas entendu arriver, c’est avec un léger sursaut et un petit son de surprise qu’elle releva les yeux avec son interlocuteur. Un homme, qui était légèrement penché sur le livre, lui souriait. Il avait parlé d’une voix claire. Elle remarqua un cache œil, mais l’ignora, et regarda son autre œil. Sans qu’elle n’y réfléchisse comme elle le ferait d’habitude, elle lui rendit son sourire en montrant la couverture.

« Triste ? Non pas du tout. Vous allez peut-être me prendre pour une folle… »

Elle tapota doucement sur le livre.

« …mais je trouve ça passionnant, dans une certaine mesure. »

Elle baissa un peu le tête, partagée entre un sourire à la fois mélancolique et mystérieux, tout en s’attendant à un « Vous êtes bizarre ». Normalement Béryl n’aurait jamais répondu une telle chose, plus poussée par un « ce n’est pas vos affaires » renfrogné. Là, elle se sentait particulièrement ouverte à la conversation, bien que son sourire disparût.

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

sourire

Béryl n’avait pas bougé, trop surprise pour oser un mouvement. Elle le regarda avec des yeux ronds, avant de visiblement se décontracter. Solitaire mais non pas anti-communication, elle ne dit rien d’abord se contentant de faire mine de réfléchir, tout en reprenant sa position normale.

« Je vous le permet, à condition que vous me le permettiez aussi. »

Elle lui lança un sourire…. Joueur. Elle attendit un peu de voir sa réaction avant de se lancer.

« Je suis soldate, dans le bataillon d’exploration. En éclaireur, plus précisément. »

Elle aurait pu dire n’importe quoi. Boulangère, Fermière, couturière, mais elle avait choisi de dire la vérité, chose effectivement surprenant. Ça devait être l’environnement. Oui c’était sûrement ça.
Gentiment, elle se redressa un peu, et mis ses jambes de manière à être assise en tailleur, sur le rebord.

« Et vous ? »

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

sourire

Elle répondit à sa réaction par un nouveau sourire. Mais il tomba rapidement quand il annonça être dans les brigades. Elle détourna les yeux, non pas gênée, mais un peu déçue.

« Ah… »

S’apercevant de sa propre réaction, elle tenta de se défendre…. Ou de rattraper les branches.

« Excusez ma maladresse. C’est juste… »

Elle prit de l’air et expira longuement, cherchant ces mots.

« C’est juste que je ne comprends pas ce que sont les Brigades, leur intérêt. Enfin, je m’exprime mal... Je ne voulais pas apporter un jugement hâtif. Excusez-moi. »

Il est vrai que Béryl n’apprécie pas les brigades, elle ne comprend pas leur intérêt alors que le Bataillon est en sous-effectif.
Elle se risqua à reposer un regard sur lui, est-ce qu’il serait blessé ?

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

beau

Son cœur se serra lorsqu’elle vit que son visage avant changé. Mais bizarrement, elle le trouvait tout aussi beau que quand il souriait. Elle se mit deux claques mentales. Qu’est-ce qui lui prenait ?
Il avait raison, d’une certaine manière, il faut de tout pour faire un monde. Mais Béryl ne pouvait s’empêcher d’avoir de mauvaises pensées concernant les brigades.

« La loi…. »

Elle posa ses mains sur ses jambes. Elle avait fait un faux pas. Autant continuer sur cette lancée.

« Je vous avoue que je connais que très peu. Et j’ai une assez mauvaise image de par les dires etc. mais peut-être…. »

Elle se retint, hésitante. Mais finalement elle osa.

« Peut-être pourriez-vous m’expliquer ? Quel est votre rôle exactement ? Et… »

Elle osa, encore plus, se tournant vers lui, le livre sur les jambes.

« Et comment est votre vie ? Enfin, si vous me permettez de demander ça… »

La curiosité est un vilain défaut, très chère.

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

chaleur

« Je vois…. C’est rassurant, à vrai dire.  »

Elle lui adressa un sourire chaleureux, comme pour le rassurer lui aussi.

« Je pensais pas qu’il y avait une branche spéciale pour le roi, enfin je n’ai jamais rien lu de tel. Ou alors je ne m’en souviens pas »

Elle réfléchit un instant.

« Quelle est la chose qui vous a le plus marqué dans votre travail ? »

C’était de la simple curiosité, Béryl voulait en savoir plus sur …cet homme. Elle ne lui avait pas demandé son prénom. Comment amener la chose….

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

extérieur

Elle lui sourit une nouvelle fois quand il lui parla de la garde du Palais. Elle supposa qu’il en avait déjà fait partie, ou qu’il en fait partie. Elle ne posa pas plus de question, elle pourrait peut-être demander une précision plus tard.

« Oooh une princesse !  »

Rien que ce mot émerveillait Béryl, ça avait l’air d’être un tout autre monde, encore différent de l’aristocratie qu’elle pouvait connaître. Elle n’osa pas trop y penser.
Son sourire sombra un peu, quand il lui demanda comment l’extérieur était. Elle baissa les yeux, un instant, comme pour évacuer un mauvais souvenir.

« C’est très beau... »

Elle vint alors plonger son regard dans l’unique prunelle de l’homme.

« Si on enlève les titans. C’est grisant même. On ne sait plus quoi regarder tellement il y a d’espace, comment respirer tant il y a d’air. »

Elle eut un sourire en coin.

« Je n’ai pas l’habitude de parler de ça. On n’en parle pas vraiment, entre nous. »

Alors elle se redressa un peu, et secoua sa tête avant de lui adresser un sourire, cette fois ci plus timide.

« Je m’appelle Béryl Exshaw ».

J’espère qu’il va me donner son nom, pensa-t-elle tout bas.

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

atmosphère

Elle hocha la tête doucement quand il parla de la beauté, qu’elle jugeait être celle des murs extérieurs. Il avait compris ce qu’elle avait voulu dire, et c’ était le principal.

Tout comme le ciel qui s’était légèrement couvert, l’atmosphère avait changé alors qu’il lui donna son nom. Elle le gravait dans sa mémoire, à la fois soulagée et ravie qu’il lui ai répondu

Sans le vouloir, la mélancolie la rattrapa au galop une seule seconde. « Au moins, quelqu’un connaîtra mon nom quand je ne serais plus là. » C’était juste une lueur, brève mais intense qui passa dans ses prunelles. Pourtant elle ne détourna pas le regard. Même quand ses joues prirent une teinte rosée.

Son propre prénom sonnait magnifiquement dans la bouche du dénommé Sawyer, Béryl observa subtilement ses lèvres, espérant qu’il le redise une seconde fois.

 « Enchantée pareillement. Enfin de même. Enfin, je suis enchantée aussi. Enfin…. »

Elle déglutit, ses yeux étaient revenus dans la prunelle de l’homme.

 « Enchantée Sawyer. »

C’était TELLEMENT cliché qu’elle ne pu retenir un sourire en coin. Doucement, elle s’extirpa de cette douce ambiance en détournant les yeux, remettant ses pieds au sol.

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

feuille

Elle eut un dilemme intérieur. Lui dire la vérité ou mentir sur l’endroit où elle habitait. Elle pouvait rester vague mais, mentir pourrait lui apporter trop de « problèmes », imaginez il lui demande d’aller chez elle après.

Attendez.

Just no.

« Oui, je vis à Karanes. Dans le quartier général du bataillon. J’ai une chambre. Quand j’aurais les moyens je prendrais plus grand mais pour l’instant… »

Elle s’était tue quand elle sentit la main de l’homme toucher ses cheveux. Elle ne broncha pas pourtant. Ce n’était pas une agression. Au contraire, elle qui avait détourné les yeux vers le QG pour donner plus de texture à ses dires, revint les poser sur Sawyer, emplis de surprise.  
Étonnée par le geste déjà, car personne ne la touchait vraiment, et surprise d’elle-même, qui se trouva apprécier le geste. Elle n’avait pas remarqué la feuille, mais se doutait qu’elle devait avoir quelque chose.

Il s’excusa.

Et le cœur de Béryl fit un bond quand il détourna le regard. Comment était-ce possible qu’un homme qu’elle ne connaissait qu’à peine lui fasse cet effet. C’était impensable quelques minutes encore plus tôt. Elle secoua la tête de droite à gauche, emplie d’une certaine douceur, tout en faisant mine de se recoiffer comme s’il l’avait ébouriffée.

 « Pas d’soucis. »

Pendant quelques instants, seul le bruit de la fontaine emplissait l’espace. Pourtant elle était de plus en plus curieuse, elle voulait parler, trouver quoi dire. Doucement, et toujours les joues un peu roses elle pencha la tête sur le côté, de façon à le regarder.

 « Votre appartement est l’enceinte du mur Sina ? »

C’était une question très étrange, mais elle n’avait rien trouvé de mieux sur le coup.

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando

-> trouver une excuse, refuser et s'en aller.

Sur le coup, elle eut presque un moment de recul quand il lui prit la main. Comme une réaction en chaîne, elle était prête à retirer sa main vivement.

Mais elle n’en fit rien, et il prit la parole.

« J’ai.. je…  J’aurais bien aimé mais… »

Qu’est-ce qui lui prenait ? Il ne fallait pas qu’elle s’attache, ou qu’on s’attache à elle. Non, c’était à la fois trop tentant, mais trop difficile.

 « Ça ne sera pas possible, le bataillon… enfin mes supérieurs, ils ne voudront jamais… »

Cette idylle était terminée. Elle baissa la tête, déçue de sa propre réponse.

 « Il va faire nuit…. Je devrais… Je devrais rentrer. »

Elle prit son livre tout en se relevant, extirpant sa main de l’étreinte dans une douceur sans pareille.

 « Ça a été un plaisir, de te rencontrer, Sawyer. Vraiment. »

Elle s’éloigna de la fontaine en quelques pas, avant de se retourner. Même si la peur de la douleur la prenait au ventre, elle avait encore envie de connaître cet homme qui lui faisait autant d’effet en si peut de temps. Elle pointa son doigt vers une rue adjacente.

 « Il y a une auberge par là-bas, et une très bonne taverne. J’y vais assez souvent après mes tâches. Peut-être qu’un jour… »

Elle laissa un blanc, comme pour se donner un léger air théâtral. Elle se détesta.

 « Nous pourrions nous y recroiser ? »

Elle lui tourna le dos sans attendre de réponse, agrippa son livre contre elle et s’éloigna à petits pas de l’endroit qui désormais, abritait un souvenir heureux.

La vraie lecture commence quand on ne lit plus seulement pour se distraire et se fuir, mais pour se trouver.

Pando